
Imaginez une entreprise où les employés auraient un maximum de liberté pour prendre le plus d’initiatives, où la hiérarchie serait réduite, où la surveillance et le contrôle laisseraient place à la auto-responsabilité et l’auto-motivation, où on n’expliquerait pas comment il faut travailler mais pourquoi travailler.Ce type d’entreprise est appelée « entreprise libérée » et le terme vient du docteur en psychologie et management, Isaac Getz. Vous en avez très certainement entendu déjà parler dans les médias ces derniers mois. Afin d’approfondir mes connaissances sur ce principe de management, j’ai lu, ou plutôt dévoré, le livre « Liberté & Cie : Quand la liberté des salariés fait le succès des entreprises » d’Isaac Getz et Brian M. Carney qui est la référence concernant les « entreprises libérées » et qui présentent l’approche des plusieurs dirigeants « utopistes » qui ont métamorphosé leur société: Harley-Davidson, W.L. Gore, Sea Smoke Cellar, Oticon, Avis, GSI, Sun Hydraulics, Ideo, … C’est surtout l’histoire de Jean-François Zobrist qui a retenu mon attention et la manière dont il a transformé en entreprise libérée, Favi, une PME française située en Picardie et spécialisée dans les fourchettes de boites de vitesse, en expliquant aux ouvriers qu’il fallait s’inspirer du plus vieux métier du monde…
Je vous propose donc de découvrir le discours entier que Jean-François Zobrist, nouveau dirigeant de Favi à l’époque, prononça à la Noël après avoir passé quelques mois à observer les ouvriers et comment ceux-ci travaillaient.
Ça fait neuf mois que je suis parmi vous… Neuf mois que je vous regarde, et que je vois des gens courageux, de grands professionnels qui aiment leur métier, mais qu’on empêche de bien travailler. J’en suis arrivé à la conclusion que des gens comme vous, qui ont vos qualités, n’ont plus besoin de carotte, ni de bâton, d’ailleurs.
Imaginez deux secondes la tête des employés et surtout des cadres de Favi.
La carotte et le bâton sont indignes de professionnels comme vous. C’est pourquoi, quand vous reprendrez le travail en janvier, les pointeuses seront démontées. Les sonneries seront aussi supprimées. Il n’y aura plus de primes non plus. Nous prendrons la moyenne des primes que chacun a reçues au cours des deux dernières années et nous l’ajouterons au salaire. Il n’y a pas de voleur parmi nous, c’est pourquoi la porte du magasin sera démontée. Il n’y aura plus non plus de distributeurs de boissons payantes, mais dans chaque atelier deux distributeurs d’eau fraîche avec des sirops et d’eau chaude avec des dosettes de café. Et pour que chacun puisse s’équiper comme il l’entend, tous les salariés de l’entreprise vont disposer d’un chèque de 100€ pour acheter ce que bon leur semble, du moment que cela a un rapport avec le travail.
Il n’y aura plus jamais de chômage partiel. Si un jour nous sommes contraints de recourir à de telles mesures, alors je mettrai d’abord les cadres au chômage, même moi.
Comment allons-nous fonctionner à l’avenir? Je ne sais pas mais je suis certain que vous méritez que nous fonctionnions autrement. Je propose que, tous ensemble, nous faisions en allant, en gens de bonne foi, de bon sens et de bonne volonté.
Les mouches volaient dans l’entreprise. Ce jour-là, Jean-François Zobrist libéra Favi de son système de contrôle, des inégalités, des systèmes de récompenses valorisant la compétition et montra sa confiance en ses employés. Mais ce n’était pas tout…
Il y a bien quelque chose dont on pourrait s’inspirer, ce sont les règles de fonctionnement du plus vieux métier du monde: celui de prostituée!
Le premier principe de fonctionnement de la prostituée est qu’elle se montre. Si elle reste enfermée dans sa chambre, elle ne trouvera pas de nouveaux clients. Donc nous allons nous montrer à nos clients.
Le deuxième principe de la prostituée est qu’elle se maquille à outrance pour attirer le regard. Eh bien, nous ferons de même, nous nettoierons les machines, les peindrons en rouge, vert, …
Le troisième principe de la prostituée est qu’elle a assurément une ou deux spécialités. Si elle ne fait rien de plus ou de mieux qu’à la maison, chacun reste chez soi. Eh bien, nous ferons de même. Nous allons tous ensemble essayer de faire plus et davantage pour nos clients.
Le quatrième principe est de ne pas transmettre de maladie à ses clients. Il y a trois maladies dont il faut qu’on se guérisse: le retard de livraison, le prix et la non-qualité.
Je vous regarde travailler depuis presque un an et votre sérieux, votre maîtrise du métier m’ont convaincu que vous aviez entre les mains les solutions à nos problèmes.
Ce discours, un peu provocateur, est l’un des multiples exemples du livre « Liberté & Cie : Quand la liberté des salariés fait le succès des entreprises » qui nous démontre que libérer le monde du travail est possible et rend heureux les travailleurs en qui on fait confiance, à qui on fixe des objectifs dignes et qu’on laisse libres de faire du bon travail. Pour votre information, Favi est l’une des rares entreprises françaises qui exporte aujourd’hui en Chine, où aucune commande n’est en retard, mais encore où le prix des pièces n’a pas augmenté en trente ans. Si vous désirez en savoir plus sur Favi et découvrir les dizaines d’exemples d’entreprises libérées et leurs ressemblances, investissez simplement une dizaine d’euros dans Liberté & Cie.
N’hésitez pas également à visiter le superbe blog spécialisé sur les entreprises libérées « liberation-entreprise ». La vidéo expliquant ce qu’est une entreprise libérée en 1 minute est simplement géniale. Qu’en pensez-vous?
Est-ce que votre société pourrait devenir demain une entreprise libérée? Ou est-ce que cette méthode qui n’est au final réservée qu’aux dirigeants, semble trop utopiste? Serait-il alors possible de changer l’état d’esprit de vos dirigeants afin qu’ils prennent conscience qu’un travailleur libéré est plus productif et plus heureux?